Certains patients peuvent parfois s'habituer à leurs acouphènes au point de les oublier.
On nomme ce phénomène le processus d'habituation.
Il s'agit de la capacité que chaque personne possède de s'habituer à des données sensorielles qu'elle reçoit.
Lorsque des stimuli sont nettement perçus au départ, il peut y avoir une focalisation initiale sur ces informations sensorielles.
Or, le processus d'habituation permet à une personne de ne plus faire cas de ce stimulus au bout de quelques temps.
Cet effet d'accoutumance peut se réaliser dans le cas des symptômes acouphéniques.
Ainsi, une personne acouphénique pourra ne plus faire cas de ses sensations sonores grâce à ce processus d'habituation.
Ce procedé naturel et inconscient permet au patient de mieux vivre avec son trouble auditif.
Le processus d'habituation découle d'une fonction naturelle de notre cerveau.
Cette fonction cérébrale permet de neutraliser tous les stimuli sensoriels répétitifs, et notamment les stimuli auditifs.
Le cerveau peut effectivement juger des sons répétitifs comme non pertinents et ainsi les filtrer naturellement.
Grâce à ce procédé, une personne pourra inconsciemment oublier des sons perçus initialement.
C'est cette fonction cérébrale naturelle qui peut être à l’œuvre dans le cas des acouphènes.
Lorsque l'acouphène est répétitif, le processus d'habituation s'enclenche naturellement.
Ainsi, les trois- quarts des patients acouphéniques gèrent naturellement bien leur trouble auditif.
Chez certaines personnes, le processus d'habituation peut intervenir très rapidement.
Cependant, il peut également nécessiter des mois ou des années pour se mettre en place, voire ne jamais se réaliser.
Certains facteurs individuels justifient la lenteur voire l'impossibilité d'enclenchement du processus. Il s'agit essentiellement d'entraves émotionnelles et cognitives.
L'apparition d'acouphènes peut engendrer des émotions négatives chez une personne et générer ainsi une grande anxiété.
Or, une personne encline au stress ou à l'anxiété fera une focalisation excessive sur le stimulus sonore représenté par l'acouphène.
Cette surfocalisation amplifie la gêne sonore et empêche l'enclenchement du procédé d'habituation.
Le système nerveux surréagit aux stimuli sonores au point de ne pas permettre l'accoutumance.
Le stress peut ainsi conserver les acouphènes dans la zone consciente, ce qui fait que la personne ne cesse d'y porter attention.
Les distorsions cognitives qui engendrent des réponses émotionnelles négatives et inappropriées peuvent être un réel frein à l'habituation.
L'aversivité des acouphènes ( soit leur faculté à entraîner des émotions négatives) est alors accentuée.
L'indice de saillance acouphénique indique l'ordre d'importance d'un stimulus pour le cerveau.
Lorsque l'indice est bas, cela indique que le stimulus ne provoque pas de grande réaction émotionnelle.
Cela signifie que le cerveau l'a filtré naturellement comme étant non pertinent.
C'est ce qu'il se passe en cas d'habituation.
Mais lorsque l'indice de saillance est élevé, cela signifie que le stimulus engendre une forte réactivité des zones auditives et du système nerveux.
Cette forte réponse émotionnelle empêche le phénomène d'habituation au stimulus ou du moins le perturbe.
Ce cas est assez fréquent chez les patients acouphéniques chroniques.
En neuropsychologie, le terme de signifiance correspond à la valeur donnée à un stimulus.
Les sons signifiants sont ceux auxquels une personne apporte de l'importance.
Il s'agit généralement des sons nouveaux, ceux survenus brusquement ou encore ceux qui peuvent être liés à un souvenir traumatisant.
Ces sons signifiants provoquent une grande réactivité émotionnelle de notre système limbique.
A l'inverse, les sons neutre sont directement qualifiés d'insignifiants par le cerveau.
En conséquence, la personne ne porte pas d'attention particulière à ces stimuli sonores.
Le processus d'habituation permet aux acouphènes de sortir du champ de conscience et de passer au statut de sons insignifiants pour le cerveau.
Lorsque l'acouphène ne provoque plus de réactivité émotionnelle, il sort du centre d'attention du patient qui ne fait alors plus cas de lui.
Le processus d'habituation donne parfois l'impression à certaines personnes que les acouphènes s'estompent complètement.
Lorsque le processus d'habituation ne se met pas spontanément en place, cela ne signifie pas pour autant que la personne est condamnée à souffrir.
En effet, de nombreuses thérapies peuvent être conseillées pour réactiver le processus.
Ainsi, l'aversivité des acouphènes peut être diminuée par des thérapies alternatives visant à réduire l'anxiété ou le stress.
Dans cet objectif, les patients acouphéniques concernés pourront pratiquer du yoga ou de la sophrologie qui travaillent notamment sur une appréhension positive du corps.
Des séances d'acupuncture ou d'hypnose peuvent également entrer dans le champs des possibilités.
Une psychothérapie peut aussi réenclencher le procédé d'habituation notamment par des exercices de réorientation psychologique ou de lâcher prise.
L'insignifiance de l'acouphène peut également passer par un travail de réassociation consistant à associer celui-ci à une émotion positive.
Les possibilités sont aussi nombreuses que diverses pour permettre de diminuer l'indice de saillance des acouphènes en présence.
Grâce à ces thérapies, le processus d'habituation peut alors se mettre progressivement en place.